André Malraux, écrivain français du XXème siècle citait selon ses mots : "Pour l'essentiel, un homme est toujours ce qu'il cache". Ce qui est caché renvoie à un secret et, dès lors, le secret correspond donc à un droit sur une information. Or, en droit, une information peut être d'une grande valeur, notamment lorsqu'elle est confidentielle puisqu'elle renvoie à l'exclusivité du détenteur. Alors:
Droit de savoir ou Devoir de se taire ?
Lors de la conclusion de contrat, il n'est pas rare de retrouver une clause de confidentialité (non-disclosure agreement / NDA) obligeant une partie à NE PAS divulguer d'information(s) confidentielle(s). Concernant les opérations sur le capital des sociétés se manifestant par des échanges d'informations sensibles, il est très courant de retrouver une NDA afin de protéger ces informations sensibles et lutter contre la concurrence déloyale. C'est pourquoi, la loi a prévu un régime juridique assez complexe.
Régime juridique
Le régime de cette clause est très détaillé afin de protéger la partie créancière de l'information. Cette protection se fait alors sur différents volets :
En droit interne, et d'abord avec le Code Civil, il est possible pour la partie créancière d'une information d'engager la responsabilité délictuelle du débiteur qui divulgue une information confidentielle obtenue lors de négociation (art.1112-2 civ). De plus, une clause de confidentialité restera valable APRÈS la résolution du contrat (art.1210) ; de son côté, le Code de Commerce prévoit la protection du secret des affaires sous certaines conditions (L151-1 com) ; le Code Pénal quant à lui prévoit des poursuites pénales pour la divulgation d'information à caractère secret (1 an et 15.000€ d'amende / art.228-13).
En droit européen, le TFUE prévoit même la possibilité de maintenir une obligation de ne pas divulguer un savoir secret pendant une durée INDÉTERMINÉE (art.101) ;
Au niveau international, les Principes d'Unidroit du commerce international prévoient également l'interdiction de divulguer une information confidentielle obtenue pendant des négociations, principe applicable pendant la phase précontractuelle ET contractuelle (art.2,1,16 idem art.1112-2 civ).
MAIS, la protection se fait également du côté du débiteur de l'information pour ne pas l'empêcher de réaliser d'autres activités.
On l'a compris, le régime de cette clause est complexe et nécessite d'être approfondi. C'est pourquoi, il est essentiel de prendre en compte certaines règles, exhaustives, lors de la rédaction d'une clause de confidentialité :
Nécessité de rédiger une clause CLAIRE et PRÉCISE, notamment afin d'éviter une requalification en clause de non-concurrence et devoir alors payer une contrepartie (Soc, 2007, Société Lablabo) ;
Le non-respect d'une NDA n'est PAS conditionnée par l'existence d'une faute lourde du débiteur, et dès lors le salarié est tenu de respecter la clause même postérieurement à la résolution de son contrat de travail car la clause est autonome à son contrat principal (Soc, 2008, Michellin) ;
Inefficacité d'une NDA dérogeant à une obligation légale (Com, 2015, Société Logware Informatique), notamment lorsque la NDA va à l'encontre d'une loi de police applicable au contexte international (Com, 2007, Argitis) ;
Nullité d'une NDA insérée dans un accord anti-concurrentiel, notamment car cela est contraire à une disposition d'OP (Com, 1998, Galec/Leclerc) ;
Mise en balance par le juge entre le droit à la liberté d'expression et le droit de l'employeur à la protection de ses intérêts (CEDH, 2019, Herbai c/Hongrie).
MAIS, il n'y a PAS d'obligation de préciser les informations à NE PAS divulguer dans la clause de confidentialité, il serait même dangereux de les mentionner car cela limiterait alors la protection à ces seules informations (au contraire de la clause résolutoire).
De la même manière, il n'est PAS obligatoire de prévoir une compensation financière (Civ, 1976, Bargellini), au contraire de la clause de non-concurrence.
Que se passe-t-il en cas de violation de la clause de confidentialité ?
La confidentialité est motivée par la valeur économique immatérielle qu'elle représente, dépendant plus de l'exclusivité de l'information, plutôt que de sa nature. Dès lors, en cas de violation de la NDA, il y aura octroi de dommages et intérêts.
Or, la violation de la confidentialité pourra être sanctionnée UNIQUEMENT si la preuve est rapportée ! Or, rapporter la preuve de la divulgation d'un secret semble difficile et : "Quand on ne peut démontrer qu'on a raison, on a tort" (Alfred De Musset). Toutefois, divulguer une information confidentielle constitue un fait juridique et emporte donc la preuve libre pour le créancier.
Dès lors, afin d'assurer les relations d'affaires, les parties prévoient souvent une clause pénale qui viendra fixer, à l'avance, le montant de la réparation du préjudice en cas de violation de la confidentialité (toujours problématique de la preuve).
Malgré tout, si la preuve de la divulgation est rapportée, il y aura réparation du préjudice subi par le créancier de l'information :
o Réparation du préjudice pécuniaire = perte ou gain manqué (art.1149 civ) ;
o Réparation du préjudice moral = réparation de l'atteinte à l'image de marque ou à la réputation du créancier de l'information.
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